Concevoir une photographie incluant elle-même intégralement ou principalement la photographie d’un tiers suppose d’obtenir l’autorisation du photographe de l’œuvre initiale, cette nouvelle création photographique étant nécessairement une œuvre composite. Le principe est aussi applicable aux photographies publicitaires originales.
Contrefaçon établie
Un photographe qui avait inclus dans son œuvre la photographie d’une vitrine du joaillier Cartier affichant la photographie d’une panthère, les pattes posées sur le rebord de la vitrine, a été condamné pour contrefaçon. La reproduction intégrale de l’œuvre première dans l’œuvre seconde a été sanctionnée et n’a pu être remise en cause par les différences de perspective et de cadrage invoquées, la contrefaçon s’appréciant par les ressemblances et non par les différences.
Exception de liberté artistique
Pour échapper à la contrefaçon, le photographe de l’œuvre seconde ne peut revendiquer la liberté d’expression attachée aux photographes de rue, lesquelles visent à photographier l’espace non privé, donc les bâtiments, les personnes et les objets (dont les publicités et les marques) qui s’y trouvent, et à capter ainsi les fragments du réel, proscrivant toute altération artificielle de l’image. Aucun équilibre n’est reconnu par les juridictions avec le monopole d’exploitation de l’auteur initial d’une œuvre.
La liberté d’expression et le droit d’auteur, compris comme une composante du droit de propriété, sont l’un et l’autre des droits fondamentaux protégés par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme. Ainsi, la Cour européenne des droits de l’homme, dans son arrêt Ashby Donald et autres contre France du 10 janvier 2013, a reconnu aux Etats membres une marge d’appréciation importante pour mettre en balance des intérêts garantis tous deux au titre de la convention européenne, l’ingérence dans le droit à la liberté d’expression pouvant viser à assurer la protection des droits d’auteur dès lors que l’article 1 du Protocole n° 1 s’applique à la propriété intellectuelle. Il appartient aux défendeurs, qui invoquent la liberté d’expression et de création, d’établir en quoi un juste équilibre entre la protection de celle-ci et celle due au droit de l’auteur imposait qu’il utilise les œuvres d’un autre auteur, au demeurant sans son autorisation. Or le photographe indique seulement avoir pris la photographie litigieuse de façon spontanée, en se promenant dans la rue, dans une ville allemande, de sorte que l’utilisation de la photographie de l’œuvre première n’était nullement nécessaire à l’exercice de la liberté que le défendeur revendique, toute autre devanture de magasin ayant pu être prise en photographie compte tenu du style de photographie de rue qui est le sien et qui s’attache à montrer le réel sans fard. Dans ces conditions, solliciter l’autorisation préalable de l’auteur de l’œuvre préexistante ne saurait constituer une atteinte à son droit de créer.
Droits de l’auteur de l’œuvre initiale
L’auteur d’une œuvre initiale jouit du droit au respect de son nom, de sa qualité et de son œuvre. Ce droit est attaché à sa personne. Il est perpétuel, inaliénable et imprescriptible. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de cet auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. Il en est de même pour la traduction, l’adaptation ou la transformation, l’arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque. Toute édition d’écrits, de composition musicale, de dessin, de peinture ou de toute autre production, imprimée ou gravée en entier ou en partie, au mépris des lois et règlements relatifs à la propriété des auteurs, est une contrefaçon et toute contrefaçon est un délit.
Originalité de l’œuvre initiale
L’originalité de l’oeuvre première était établie : la posture de la panthère paraissait indiquer qu’elle regardait intensément, en le convoitant comme une proie, le contenu de la vitrine. La queue de la panthère reposait sur le sol et l’animal ainsi campé sur ses membres, le corps effilé et élancé semblait marquer la concentration et l’intérêt irrépressible et sauvage qu’un fauve a pour sa proie avant de bondir sur elle. Le corps tout entier de l’animal semblait tendu vers l’intérieur de la vitrine et les bijoux qui y étaient visibles. Cet effet entraînait, par humour et analogie, la curiosité pour ce que voit l’animal dans la vitrine chez celui qui voit la photographie, des bijoux, mais aussi une panthère sculptée, symbole de la marque. Télécharger la décision
Points juridiques et Modèles de contrats associés:
- Propriété des droits sur une photographie : affaire France… La présomption de la titularité des droits d’exploitation, dont peut se prévaloir la personne morale qui commercialise sous son nom une oeuvre, n’est opposable qu’aux tiers poursuivis en contrefaçon et ne vaut pas à l’égard de celui qui revendique la qualité d’auteur sur cette œuvre.
- Se défendre d’une action en contrefaçon de photographie En défense d’une action en contrefaçon de photographie, il peut être judicieux de soulever une fin de non-recevoir au titre de la prescription de l’action.
- Photographie du salarié endormi : la date compte Concernant la captation de l’image du salarié, l’employeur a tout intérêt à horodater ses images. Un employeur a, sur la base de photographie, licencié son salarié surpris à plusieurs reprises endormi à son poste de travail. Or, aucune des photographies
- Photographie d'une villa : l'atteinte à la vie privée… Le domicile est l’une des composantes de la vie privée. La publication d’une photographie de villa sur internet peut constituer une atteinte à la vie privée mais l’action du propriétaire est soumise à la prescription de droit commun.
- Affaire PSG / Ici Paris Dans l’affaire opposant le PSG à son club de supporters concernant la marque « Ici c’est Paris », les juges ont désigné le CMAP pour mener une médiation judiciaire. Pour ceux qui n’auraient pas suivi l’affaire, l’association Défense des droits des supporters est titulaire de la marque verbale française « Ici c’est Paris » déposée il y a près de 10 ans
- Affaire Charb / Jeannette Bougrab On se souvient que la famille de Stéphane Charbonnier dit Charb, feu caricaturiste de Charlie Hebdo, avait démenti formellement auprès de la presse, l’engagement relationnel de Charb avec Jeannette Bougrab.
- Affaire « Sauvermonpermis » La Cour de cassation confirme sa position sur les dispositions déontologiques et la publicité de la profession d’Avocat : celles-ci ne sont pas applicables aux tiers étrangers à la profession. La société Sauvermonpermis vient d’emporter une manche judiciaire. Soutenant qu’une Société se livrait à des actes de concurrence déloyale
- Gleeden : l’adultère, une affaire privée La communication publicitaire de la société Blackdivine qui exploite le site de promotion de relations adultères Gleeden, n’est pas illicite. L’association CNAFC (confédération des familles catholique) a plaidé sans succès la cause illicite des CGU du site Gleeden.
- Affaire Le Figaro : la base factuelle insuffisante La condamnation du Figaro et de l’une de ses journalistes pour diffamation a été confirmée par les juges suprêmes (1 000 euros de dommages et intérêts).
- Référencement forcé : affaire Société.com La pratique consistant à référencer des professionnels sans leur consentement ne semble pas illégale. Un avocat a plaidé en vain l’existence d’un trouble manifestement illicite contre la SAS Société.com qui propose, via une multitude de sites Internet, des « fiches avocat » en y associant des numéros surtaxés qui ne sont pas ceux des avocats concernés et sans l’autorisation de ces derniers.
- Logo diffamatoire : affaire UFC Que choisir La diffamation n’est pas limitée par les supports, un logo peut parfaitement constituer une diffamation. L’auteur du logo diffamatoire peut se prévaloir de la bonne foi pour échapper à une condamnation pour diffamation.
- Affaire Caudalie : présomption de prix distributeurs imposés… Les opérations de visite et de saisie au siège social de la société Caudalie ont été confirmées par le juge des libertés et de la détention (JLD). L’entreprise est présumée avoir exercé une pression sur ses distributeurs, notamment ceux déployant leur activité en ligne, afin de les obliger à appliquer des prix de revente établis par elle.
- Affaire Brandalley : 500 000 euros de préjudice En présence d’une violation de réseau de distribution sélective sur internet (ventes flash de parfums de luxe), l’un des moyens de défense à exploiter est la preuve du caractère anti-concurrentiel des contrats de distribution conclus (preuve non rapportée en l’espèce). Dans l’affaire opposant les sociétés Brandalley et Coty, la licéité du réseau de distribution sélective de la société Coty a…
- Contrefaçon de packaging : affaire Repetto La contrefaçon de conditionnement / packaging n’est sanctionnable qu’en présence de ressemblances emportant un risque de confusion ou en cas de copie servile. L’action en contrefaçon peut être dirigée contre le titulaire de la marque ou contre le licencié.
- Affaire Barbara Bui 4/10/2019. La société Barbara Bui, invoquant des droits d'auteur sur six modèles de vêtements et des droits sur des dessins et modèles communautaires non enregistrés, a obtenu la condamnation de la société RT international en contrefaçon et concurrence déloyale (500 000 euros de dommages et intérêts).